Description
La composition de Vents est inséparable de ce paysage sauvage et revigorant de Seven Hundred Acre Island, l’île privée de Béatrice Chanler située sur les côtes du Maine. Régulièrement invité chez les Chanler à partir de 1942, Seven Hundred Acre Island est donc l’un des lieux de prédilection du poète durant son exil américain. C’est là où sera achevé le poème ébauché depuis quelques mois. Mais il est également imprégné de toute une intense fréquentation d’autres paysages américains marquants (Arizona, Texas, Colorado) que découvre Perse lors de voyages entrepris en cette année 1945, et dont le poème gardera trace. Perse est littéralement fasciné par le gigantisme et la force des éléments géologiques qui se déploient sous ses yeux, et c’est avec frénésie qu’il y collecte les matériaux de son poème, comme en témoignent les archives conservées à la Fondation Saint-John Perse. Certes, le poème appelle des terres très lointaines, il institue un chant de la conquête humaine de l’espace, mais on peut effectivement y déceler tout un panorama de ces paysages américains que vit le poète avec ferveur : s’étendent des horizons à la mesure d’un souffle ample, et où l’appel à repousser les limites connues s’accorde au pas de l’homme. Cependant, l’attention du poète ne s’arrête pas aux paysages conçus comme réceptacles d’un imaginaire, ce sont aussi les hommes qui les peuplent qui suscitent son très vif intérêt. C’est le cas en particulier pour les Indiens (notamment les Navajos), dont les pratiques chamaniques marquent son esprit, jusqu’à constituer un motif essentiel de l’accès à la connaissance telle qu’elle est présentée dans le poème.
Saint-John Perse a toujours accordé à Vents une importance particulière dans son œuvre. Ce poème fut sans doute le moins accessible au lecteur français parce qu’il ne fut, à la demande même du poète, publié tout d’abord qu’en édition de luxe de grand format, à tirage limité entièrement numéroté.
Denis Lavant a choisi d’interpréter « Vents », d’une façon qui lui est propre, emphatique, théâtrale et extraordinairement habitée. A partir de cet enregistrement fait en une seule prise, Patrick Müller, avec l’aide de Quentin Rollet au saxophone, a habillé ce long poème, d’une manière qui n’a rien de convenu ou d’illustratif : A partir de motifs abstraits, il sculpte la matière sonore en accumulant de façon subtile traitements électroacoustiques qui viennent considérablement enrichir et renouveler ces 38 minutes d’une grande puissance évocatrice. L’expérimentation y est constante, sans pour autant prendre le pas sur le texte et la voix toujours étonnante de Denis Lavant.
Denis Lavant has chosen to interpret « Vents » in an emphatic, theatrical and extraordinarily lively way. From this recording made in one take, Patrick Müller, with the help of Quentin Rollet on saxophone, accompanied this long poem, in a way that is not at all easy or illustrative: he sculpts the sound material by accumulating in a subtle way electroacoustic treatments which considerably enrich and renew these 38 minutes of great evocative power. Experimentation is constant there, without however taking precedence over the text and the always astonishing voice of Denis Lavant.
Denis Lavant: voice
Patrick Müller: electrosonic
Quentin Rollet: alto and sopranino saxophones
Artwork: Thierry Müller
Coproduction: BISOU / trAce label